Le choix de l’auteur

« Bonjour,
Je suis une amatrice de l’encre sur papier ^-^ et je suis bloquée non pas parce que je n’ai pas d’idée mais tout le contraire. Pleins d’idées me viennent mais je ne sais pas comment les choisir. Lorsque j’ai une idée plus ou moins fixe, mon imagination s’amuse à me donner encore plus d’idées ! et je me retrouve encore coincé -_- »

Maeva

 

Chez les auteurs, c’est un serpent de mer.

C’est un refrain dans les Lettres du Dimanche.

La répétition sert la pédagogie, alors je n’ai aucun scrupule à redire encore et encore la même solution.

 

À vrai dire, plus un auteur avance, plus il est confronté à cette réalité.

Ce qui façonne un auteur, ce n’est pas l’abondance de son imagination.

Ce n’est pas non plus sa grande érudition.

Ce n’est même pas l’étendue de son vocabulaire.

 

Comme tous les artistes, l’auteur se définit d’abord par sa capacité de poser un jugement singulier.

Déterminer ce thème. Évaluer cet axe dramatique. Croquer ce personnage. Ciseler tels et tels détails concrets. Choisir chaque mot.

 

Alors, bien sûr, au début, on galère, on déborde, on patauge, on coule.

 

Quand on apprend le piano, on reste planté devant les touches comme une poule devant un couteau — non, parce qu’en plus ces saligauds n’ont même pas mis une touche noire après chaque touche blanche. Comment voulez-vous vous y retrouver, hein ? Alors quand il s’agit de savoir laquelle appuyer au moment opportun…

 

Pour l’écriture, c’est pareil.

Non, c’est même pire.

Car on CROIT savoir raconter des histoires parce qu’on s’en est gavé.

Au moins, face à un piano, on reste humble.

 

Ben oui, voyez-vous, un jeune lecteur est déjà expert en histoires. Il vibre comme une feuille aux émotions, il devine les moindres sous-entendus, même ceux qui n’ont pas été prévus…

 

Alors on se dit qu’en écrivant comme on lit

 

Sauf que ça ne marche pas. Cette fausse croyance alourdit le travail.

Ou plutôt le gêne, l’aveugle.

 

Le lecteur goûte les choix de l’auteur… Mais il ne les choisit pas lui-même !

Passer de l’autre côté appelle la décision.

Et ça s’apprend.

 

Comment ?

Très simplement.

En passant à l’acte puis en évaluant son choix.

Encore et encore.

 

Tenez, par exemple, dans le premier Atelier du Dimanche j’ai proposé 3 thématiques assez proches. J’aurais pu en proposer une dizaine autour du même thème, dans des directions très différentes. Mais je voulais vous laisser choisir dans un mouchoir de poche (d’ailleurs vous pouvez encore le faire en commentaire, je vais bientôt commencer à travailler la suite : https://youtu.be/qiYR9Wlmsj4).

 

Oui, votre choix est déjà cadré par les miens.

J’ai choisi le genre Science Fiction.

J’ai choisi le thème de l’intelligence artificielle.

Et si je vous ai sollicité pour aller encore plus loin dans la concrétion thématique, remarquez bien que je vous ai déjà formulé les propositions. Je ne me suis pas contenté de poser les problèmes : j’ai même tranché une conclusion pour chacune !

 

Attention, ça ne veut pas dire que j’ai une idée pour la suite.

Très franchement, je ne sais pas où ça va nous mener. Je sais juste comment avancer. Et c’est mon but de vous le montrer.

Pour avancer, il faut choisir un but. Et garder le cap d’une poigne d’acier.

 

Quand vous aurez élu votre thématique favorite, les autres options seront éliminées et ne pourront plus devenir la thématique principale de cette histoire.

Je sais que je ne reviendrai pas dessus parce que ce serait reculer.

Je sais que je serai sûr de notre choix, parce que je l’assumerai.

 

Plus on juge bien, mieux on juge.

Tout l’enjeu du travail d’écriture, c’est de perfectionner vos choix, leur vigueur et leur constance. Évidemment, les outils dramaturgiques sont là pour vous y aider. Les histoires se forgent à la logique autant qu’à l’émotion.

 

Mais quand un auteur bloqué se perd dans ses options, c’est souvent qu’il a oublié de choisir. Alors je le force à poser son choix, jusqu’à le rudoyer parfois.

 

Souvent, il faut remonter d’un cran pour expliciter l’intention et simplifier. Parfois, il faut aller jusqu’au pitch, même si les premiers chapitres sont déjà rédigés : en une phrase, quelle histoire voulez-vous raconter ?

Alors, on jette avec violence un brouillon sauvage, on gribouille en quelques traits l’histoire brute.

On sue, on vitupère, on s’exclame !

Le pitch s’étire, s’étale, s’épuise sur la page.

Je reviens à la charge : il faut encore trancher dans le vif !

Un vrai champ de bataille.

Quelle pauvreté abstraite que ce pitch ! Il manque ceci, cela est en trop. Autant couler l’océan dans un dé à coudre !

 

Ah ! Serais-je donc sadique d’apprécier bouillir ainsi les viscères des auteurs ?

 

Non bien sûr.

Car je sais que le travail, l’effort d’accouchement, n’est jamais vain.

Toujours, il en sort une merveille en puissance.

Oui, en puissance, car, soyons honnête, sauf pour la maman, un nouveau-né couvert de sang, déformé par le démoulage, est rarement beau. Attendrissant, peut-être, parce qu’on rencontre un nouvel être tant attendu. Mais le meilleur est à venir. Il va grandir, se renforcer, s’éveiller, se déployer et s’élever enfin, pour autant qu’on prenne soin de lui.

Voilà donc votre rôle d’auteur !

Perfectionnez votre jugement.

Au boulot !

 

Eric

P.S. Je ne vous en ai pas encore parlé ici car je pensais l’affaire pliée d’avance, vu la grande qualité du projet — je connais bien le capitaine, pour avoir baroudé avec elle dans plusieurs eaux tumultueuses. Et j’avais raison d’anticiper le succès, puisque l’objectif a été largement dépassé depuis quelques jours. Ce n’est donc pas une bouteille à la mer, mais la proposition d’une folle aventure. Il ne vous reste que quelques jours pour embarquer :

https://fr.ulule.com/editions-la-caravelle/

P.P.S. Vous êtes déjà nombreux à avoir répondu au grand sondage sur un roman participatif. Merci ! Si ce n’est pas encore fait voici le lien où vous signaler (c’est gratuit) : http://www.ecrire-un-roman.com/articles/ma-plume-ma-muse-hors-serie-sondage/

 

 

La mise en scène dans votre roman

Les auteurs ont souvent du mal à se projeter dans la mise en scène. Même quand ils ont un plan détaillé, voire un scène-à-scène très complet, ils évitent plus ou moins consciemment  cette étape en se précipitant dans leur narration, ou pire, dans le style, sans penser à la réalité de l’action.

A vrai dire, il ne s’agit pas seulement de « penser » ce qu’il va se passer, mais de le « concrétiser. » Il n’y a pas besoin de creuser profond pour imaginer l’action générale.

Mais c’est une autre histoire que de l’incarner.

La première chose à faire, évidemment : scruter l’action avec un « regard d’expérience. »

Vous racontez l’histoire d’un boulanger ? Il faudra mettre la main à la pâte, toutes les nuits.

Bon… Vous allez me dire que vous n’avez pas trop le temps ?

OK, les romanciers ne sont pas forcément docteur en médecine, astronaute, empailleur de dragon, psychopathe ET flûtiste (si vous l’êtes, merci de vous signaler uniquement par email, je ne reçois plus dans mon donjon, au cœur des Carpates normandes).

Nous sommes donc face à un dilemme, car un romancier DOIT pouvoir vivre ce genre de choses pour les raconter. Sinon, comment voudriez-vous le communiquer à vos lecteurs ? Ils sentiront que vous vous jouez d’eux, que vous ne savez pas de quoi vous parlez, que vous vous payez de mots, que vous agitez des concepts…

Heureusement, notre cerveau a une faculté superbe qui nous permet de ressentir ce qu’on ne ressent pas et jusqu’à l’irréel : l’imagination.

Attention ! Je ne parle pas de l’utiliser en doux rêveur.

Sinon vous retomberiez dans le travers que je viens de dénoncer, à ne pas vraiment vivre, expérimenter.

Il faut mobiliser toute sa puissance et la diriger précisément. Cela demande un effort de concentration et la direction de l’intelligence.

Car ce qui doit vous guider, c’est votre message, votre histoire.

Si le personnage marche dans la rue, je me coule dans la scène. Même si j’écris confortablement dans mon canapé, je me projette sous le soleil. Je ressens le poids de l’air étouffant, la poussière qui colle au cou et qui pique les narines…

Mais je ne m’arrête pas là.

Aussitôt, j’alimente ce ressenti avec l’état d’âme du personnage et sa propre façon de ressentir cette chaleur, pour ajuster ma future narration.

Car pour certains, elle ne paraîtra pas étouffante, mais sécurisante et bienfaitrice. Peut-être que mon personnage appréciera la brûlure sur ses épaules, comme si sa mère repassait sa chemise…

Si c’est un chaudronnier, qui travaille le métal en fusion tous les jours, aura-t-il la même perception ? Il en aura sans doute moins peur, il saura la « laisser glisser » sur son cuir et redoutera les courants d’air…

En vous posant de telles questions, vous pouvez modifier votre perception de la scène par analogie à votre propre expérience.

En effet, il vous est sans doute arrivé de vous sentir à l’aise quand d’autres avaient chaud ou froid. L’analogie permet de déplacer ce rapport, de changer d’échelle.

Tenez, un autre sujet d’analogie : les cultures

Quelle vision un Esquimau a-t-il de la vie ?

Et un Elfe marin ?

Pour éviter les images d’Épinal ou les stéréotypes, il faut se documenter suffisamment.

Quant aux êtres fantastiques, il est toujours possible de trouver des analogies avec des êtres existants.

Mais ce n’est pas l’objet de cette Lettre du Dimanche.

Une fois qu’on a bien réalisé, il est temps de la faire passer au lecteur.

Facile à dire ! Car tout n’est pas bon à raconter :seules quelques aspérités suffisent ! C’est là que le talent du romancier — et son travail surtout — montrent leur vertu.

Exercice du jour : un petit caprice !

Entraînez-vous avec le Ma Plume Ma Muse du jour, en mettant en scène un enfant.

Cliquez ici : http://www.ecrire-un-roman.com/articles/ma-plume-ma-muse-il-ny-a-pas-dage-pour-faire-des-caprices/

Au boulot !

Eric

PS. Certains ne reçoivent pas correctement la Lettre du Dimanche. Je suis en train de changer de système et il faudra que vous vous réinscriviez. Mais je vous en reparlerai très bientôt.

 

 

 

 

 

Ma Plume, Ma Muse : Il n’y a pas d’âge pour faire des caprices !?!

 

Trouvez le mot juste pour vos romans

Le bon romancier ne se contente pas d’enchaîner les phrases : il dispose d’un vocabulaire étendu et fait résonner les mots. L’enjeu est alors d’induire le lecteur à entendre telle résonnance plutôt que telle autre.

La lune cendrée

Brune-El, est une femme généreuse qui, depuis deux ans déjà, donne énormément de son temps aux jeunes auteurs. Son regard d’aigle guette les moindres coquilles et sa passion s’enflamme, toujours sincère. Écrivain talentueux, elle signe aujourd’hui son premier roman : La Lune Cendrée.

Comment choisir votre narrateur

Faut-il écrire avec le point de vue du « je » ? Ou plutôt en rester au « il » ?

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« La plus grande richesse c’est… »

Chers auteurs,

Merci d’abord à tous ceux qui m’envoient des messages de bienvenue. Je suis très touché de voir comme vous aimez ce site. Cela m’encourage à donner le maximum – et plus encore !

C’est le moment de prendre le flambeau et j’ai le cœur un peu serré…