Imaginez, après plusieurs mois de travail sur votre roman, le trouver en vente… publié par un autre auteur ! Vous n’en croyez pas vos yeux : il a repris mot pour mot votre oeuvre, il a volé vos personnages, jusqu’au moindre détail…

Après la stupeur, une boule de colère se coince dans votre gorge (ce qui vous évite le ridicule de crier dans la librairie). Une chose est sûre : vous avez été plagié !

L’injustice est d’autant plus brûlante quand vous découvrez qu’il a un certain succès.

Heureusement, cela n’arrive pas souvent. Et surtout, vous pouvez protéger votre roman.

J’avais demandé à Virginie-Marie, la juriste de l’équipe, de nous faire un petit point sur le sujet, histoire d’avoir les repères essentiels pour bien en comprendre les bases juridiques.

Je pensais ne recevoir que quelques explications, mais elle a écrit un excellent article et je ne résiste pas de vous l’offrir aujourd’hui.

Je la remercie de tout ce travail (et vous invite à en faire de même en commentaire)

Bonne lecture ! (On se retrouve à la fin)

Eric

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Copyright-Protection d'auteur

Plagiat, vous avez dit plagiat ?

Le droit français distingue la notion « d’idée » de celle  « d’œuvre de l’esprit » (art L112-2 du code de la protection intellectuelle).

En clair, une idée, aussi bonne soit-elle, ne peut pas être protégée.

Par exemple : Si demain j’annonce que je vais écrire une histoire dans laquelle une banque se fait braquer par un vampire sanguinaire qui veut gouverner le monde et que quelqu’un s’empresse d’écrire une histoire basée sur cette idée, eh bien je ne peux pas brandir le sacro-saint droit d’auteur.

Une idée ne peut pas être protégée

 

Mais alors que peut-on protéger ?

On peut protéger une oeuvre dès le début du processus qui emmène l’idée de départ vers un tout cohérent et unique.

Pour mieux le comprendre, deux autres articles de la loi méritent qu’on s’y arrête un peu.

Le premier est l’article L111-2 du code de la protection intellectuelle.

Il dispose que « l’œuvre est réputée créée, indépendamment de toute divulgation publique, du seul fait de la réalisation même inachevé de l’auteur.  »

Ce joli charabia signifie que lorsqu’un auteur présente son manuscrit (qui n’est donc pas encore un livre) à une maison d’édition, son travail bénéficie déjà de la protection de la loi et ce même s’il doit être retouché.

À la lecture de cet article, nous serions tentés de nous dire « Génial !! Mon roman est protégé puisque c’est moi qui l’ai écrit ! »

Sauf que le second article complique les choses :

En effet, l’article L113-1 affirme que « la qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l’œuvre est divulguée ». La supposition de la qualité d’auteur peut donc être renversée par tout moyen.

Ce qui signifie que si quelqu’un publie votre travail en son nom, ce sera à vous de prouver que vous êtes bien le créateur du texte en question…

5 moyens de protéger son œuvre

La première chose à retenir, c’est qu’il n’y a pas de protection « infaillible » comme on pourrait le penser. La loi dispose clairement que la preuve peut se faire par tout moyen, ce qui signifie que l’auteur apporte le maximum d’indices prouvant l’antériorité de son œuvre, mais c’est le juge et lui seul qui déterminera cette antériorité en cas de conflit.

D’où l’intérêt de ne rien jeter (je pense notamment à tous ces fichiers contenant les innombrables versions premières, les brouillons, sans queue ni tête, etc.).

En pratique, ce qui permet à l’auteur de faire un pas dans la lumière de la protection, c’est le dépôt de l’œuvre. Pourquoi ? Simplement parce que cela fait acquérir une date certaine au texte.

Il existe plusieurs possibilités pour faire un dépôt :

  1. Tout d’abord, il existe les sociétés d’auteurs. Vous avez par exemple la SGDL (http://www.sgdl.org) : pour un coût de 45 euros, votre texte est protégé pendant 4 ans ; la SACD (http://www.sacd.fr/Accueil.1.0.html) : pour 46 euros, votre texte est protégé pendant 5 ans ; et il y aussi les sites de copyright, par exemplehttp://www.copyrightfrance.com, où différentes formules sont proposées.
  2. Ensuite vous avez la possibilité de déposer votre œuvre chez un huissier ou un notaire. À savoir que cela reste quand même assez onéreux.
  3. Il existe aussi un système que l’on appelle l’enveloppe Soleau :http://www.inpi.fr/fr/enveloppes-soleau. Attention,  cette solution permet l’envoi de 7 pages maximum de format A4.
  4. Enfin la solution la plus simple et la moins chère est de s’envoyer à soi-même le manuscrit par la Poste en recommandé avec accusé réception. La lettre ne devra en aucun cas être ouverte et pour le garantir, veillez à la cacheter, voire la fermer à la cire, ce qui donne un petit côté mystique à la chose (désolée je m’éloigne du sujet). Attention, à partir de là, plus question de modification, cette lettre rentrera dans le faisceau d’indices permettant de prouver l’antériorité de votre œuvre devant un tribunal.
  5. Dans le même ordre d’idées, vous pouvez aussi vous envoyer votre roman par e-mail, vous gardez les mails d’envoi et de réception ainsi que les pièces jointes sur une clé USB et le tour est joué.

Bon à savoir : la protection juridique d’un texte peut naître dès la création du synopsis (récit succinct constituant le schéma de votre histoire, et qui consiste en une présentation sommaire du sujet et une esquisse des personnages principaux). Mais attention, pour que le juge puisse le recevoir comme œuvre et pas comme une simple idée, le synopsis doit être bien détaillé, faire état des différentes étapes du récit jusqu’à la fin du récit et surtout  faire apparaître la touche personnelle de l’auteur, son style.

En conclusion, le plagiat existe, oui, il est préférable de protéger nos textes dans la mesure de nos moyens.

Cependant, la psychose n’est pas nécessaire. Il reste assez rare de se faire plagier en proportions des œuvres créées. Concentrons-nous sur nos histoires pour les rendre uniques et captiver le lecteur, sans crainte ni rancœur. La loi veille à sa manière sur nos futurs chefs-d’œuvre.

Virginie-Marie

 

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Merci Virginie-Marie !

En ce moment même, grâce à tous ces renseignements précis et éclairants, l’équipe d’Ecrire un Roman travaille à mettre en place un système de protection gratuit et efficace qui prouvera l’antériorité de vos œuvres.

En attendant, si votre manuscrit n’est pas terminé (ou tout simplement pas commencé), je vous invite à rédiger un synopsis reprenant chaque étape de l’histoire, afin de protéger votre roman dès que possible — sans compter qu’un synopsis bien construit facilitera grandement le travail d’écriture de votre premier jet.

AU BOULOT !

Eric