Bonjour à tous,

La première fois que j’ai entendu parler de Seconde Chance, c’était il y a plus d’un an, sur le forum. L’écriture est un immense champ des possibles. Quand certains choisissent de créer leurs mondes, d’autres préfèrent dépeindre la réalité. Pour son premier roman, Iléana Métivier nous plonge dans celle que Monsieur et Madame Tout-le-monde prennent soin d’éviter : l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE). Alors toute jeune diplômée dans ce secteur, ce choix m’a fortement intrigué.

Après de nombreuses péripéties, Seconde Chance est sorti le 5 avril aux Éditions Guinet.

Pour quels lecteurs ?

– Tout public ;

– Les amateurs de roman engagé ;

– Toute personne souhaitant écrire un récit à plusieurs narrateurs.

Estéban, Nina, Théo, Violette et Sofiane sont des ados face à qui l’ASE a échoué. Mais c’était sans compter sur la pugnacité de Gino. Cet éducateur spécialisé met au point un projet unique et innovant : la Ferme. Avec sa collègue Sandrine, il se donne un an pour remettre cinq jeunes sur le droit chemin. Si leur pari se concrétise, d’autres Fermes verront le jour. Dans le cas contraire, son beau projet ne sera plus qu’une utopie.

La première bonne idée de cet ouvrage est la présence de narrateurs multiples. Plus que donner la parole à tous, cela nous permet d’accéder à leurs pensées et les voir se remettre en question. Du point de vue de ces ados, à qui on ne la fait plus, c’est aussi l’occasion de connaître leurs réactions face à cette nouvelle initiative.

J’ai beaucoup apprécié le design des glyphes. En effet, en plus d’introduire le personnage qui prend la parole, elles nous donnent un avant-goût de la personnalité de chacun.

Le concept de la Ferme se déroule progressivement avec ses avantages :

« Vivre un an avec les jeunes nous offrait un luxe impensable dans les bureaux de l’ASE : prendre le temps. Le rêve de tout éducateur, en somme. » (Gino)

Mais aussi ses limites : un investissement de tous les jours sans congés. Dans ces conditions, la distance professionnelle peut vite se muer en affinité et l’empathie en sympathie*.

En parallèle, nous assistons à l’évolution des personnages. Et là encore, force est de constater qu’Iléana a tout prévu. En effet, elle la personnalise en tenant compte de deux critères essentiels : leur passé et les événements présents. Ne vous attendez donc pas à les voir « guéris » de leurs démons en 365 jours chrono !

Le quotidien dans le fin fond de l’Ardèche a de quoi devenir banal, répétitif… au risque de lasser le lecteur. Heureusement, de nombreuses péripéties viennent casser la routine. Balades en pleine nature, excursions en ville ou au bal communal, il y en a pour tous les goûts et l’ensemble sert de support pour pousser à bout les éducs’, lier les ados, ou les amener à se confier.

Seul bémol à signaler : l’épisode de la fugue. Je m’y suis attendu depuis ce passage tiré du premier chapitre :

« Lequel ou laquelle d’entre eux débloquerait l’abord aux escaliers de métal ? Gino et moi, nous y attendions avec calme, persuadés que l’incident se produirait au moins une fois dans l’année. La campagne autour les dissuaderait peut-être de tenter la sortie en pleine nuit, mais cette hypothèse restait à prouver. Le système d’alarme, relié au commissariat et à la caserne des pompiers, jouerait en leur défaveur. » (Sandrine)

Le verdict

La clé de ce roman repose sur l’empathie du lecteur vis-à-vis des personnages. Très crédibles, bien structurés et hauts en couleur, ils semblent plus vrais que nature. À force d’avoir envie de savoir la suite, je ne me suis pas rendu compte que je le dévorais, tant sa lecture est addictive.

Malgré la tentation, l’auteure ne cède pas au pathos. Elle tire parti des situations et du parler des ados pour parsemer ses chapitres d’humour et de répliques cinglantes. Explosion de rire garantie !

Même si un projet comme celui-ci ne risque pas de voir le jour en France, Iléana a le mérite de pointer les faiblesses d’un système éprouvé, qui a besoin d’un sérieux coup de jeune.

« Elle aspirait simplement à la preuve qu’elle était plus qu’un numéro. Qu’elle était plus qu’un cas à sauver. Elle voulait qu’on la traite comme un être humain qui a besoin d’avoir confiance en la personne à qui il va parler de ses problèmes. Après tout, moi aussi, je ne raconterais pas mes soucis au premier venu. Et pour Violette, la casquette d’éducateur ne voulait pas signifier confiance, mais plutôt bureaucrate. Personne ne se livrait à un bureaucrate. » (Sandrine)

Sandrine et Gino arriveront-ils à tenir leur pari ? Pour le savoir, le mieux est encore de le lire !

Pour ma part, je suivrai avec plaisir cette nouvelle auteure. Si vous souhaitez m’imiter, Voici quelques adresses incontournables :

Son Facebook, son site et son blog.

* La distance professionnelle et l’empathie sont deux ingrédients élémentaires pour préserver la bientraitance (NdlC).