Le style est le premier intermédiaire par lequel on entre dans une histoire.

Il ne la structure pas, mais il la recouvre comme un vernis qui la fait briller.

Un style agréable invitera votre lecteur à poursuivre sa lecture. Ou bien, il le repoussera.

Il y a autant de style que d’auteurs et vous ne trouverez pas ici un moule où fondre le vôtre.

Pourtant, bien que les qualités d’écriture ne soient pas les mêmes chez tous les auteurs, un bon vers de Boileau est bon pour les mêmes raisons qu’une bonne phrase de Victor Hugo.

On peut en tirer des règles de l’art.

Le mot « style » vient du stylet avec lequel on gravait les lettres dans la pierre

Le mot « style » vient du stylet avec lequel on gravait les lettres dans la pierre

Comment travailler son style

Voici le principe conducteur à garder à l’esprit :

le style porte le message, il s’efface devant lui.

Le style idéal est transparent. Tout ce qui peut freiner la lecture doit être proscrit. Cherchez au contraire la clarté, la concision et l’énergie.

Pré-requis : Corrigez votre orthographe et votre grammaire

Cette partie peut être décourageante pour les anciens écoliers maltraités, fâchés avec les mots. De bons logiciels peuvent vous soutenir (si vous en utilisez un avec succès, partagez-le en commentaire : je les mettrai à la suite) :

  • – Prolexis (payant autour de 100 € pour le Petit Prolexis)
  • – Antidote (payant autour de 100 € également)
  • – Scribens (en ligne : http://www.scribens.fr/ ; demande de faire un copier-coller et on ne peut pas mettre plus de 20 000 caractères à la fois… mais il est gratuit)
  • – Cordial (en ligne : http://www.cordial-enligne.fr/ ; comme Scribens, il est gratuit mais il n’accepte que 3 000 caractères)
  • – BonPatron (en ligne : http://bonpatron.com/ Dans la version gratuite de ce site, les textes ne peuvent pas dépasser 2 000 caractères (environ 250 mots).
  • – Les traitements de texte (OpenOffice, Word, etc.) ont des correcteurs réputés plus fiables. Ils vous permettront de repérer une bonne partie des fautes, pourvu que vous preniez le temps de les regarder.

Mais c’est loin d’être suffisant.
Il est essentiel et urgent de vous réconcilier avec la langue française.
Stimulez votre curiosité en vous demandant ce que veulent dire les mots que vous utilisez.
Entraînez-vous par de petits exercices. Notez peu à peu sur un carnet dédié vos fautes récurrentes et les mots que vous découvrez.

Vous pouvez  suivre le site www.motamots.fr, tout frais et très prometteur.

Le sens avant tout

Écrire, c’est peindre. Pour améliorer votre style vérifiez avant tout le sens de vos mots. Le style doit provoquer chez le lecteur une représentation juste et efficace.
Pour qu’il soit juste, le mot choisi doit peindre la réalité.

Style à éviter

Prenons par exemple, la première phrase de la trilogie La porte d’Antoine Douzet. Je le fais sans scrupule, puisque cette trilogie semble avoir du succès. Et l’exigence est aussi une preuve de respect.

« Une lune passive et douce projetait la splendeur luisante de ses pitons sur les vergers de la cité marchande de Mytilène. »

S’il avait voulu améliorer son style, l’auteur aurait dû se poser davantage la question de ce qu’il voulait peindre et de ce qui était vraiment perçu par le lecteur.

« Une lune passive »

Pourquoi la lune est-elle passive ? Jetons un oeil dans un dictionnaire : quelque chose de passif subit une certaine action. Or, à peine deux mots après, on lit qu’elle « projette » (ce qui dénote une action). Cette contradiction n’apporte rien. Ce mot me semble inutile, il faudrait l’enlever.

La lune projetait « la splendeur luisante »

L’auteur parle de sa lumière. Regardons « splendeur » dans le dictionnaire. Le substantif correspond bien à un astre… mais il convient mieux au soleil. En effet, le mot dénote une lueur vive, intense, d’une couleur extrême. Pourquoi pas l’utiliser pour la lune…

Seulement dans la même phrase, l’auteur vient de dire que la lune était douce (et passive). Quel mot doit-on croire ?

En outre, c’est une redondance, « luire » signifiant « émettre de la lumière ».

« de ses pitons »
L’image ne porte pas, elle est maladroite. Pourquoi ? Parce qu’on imagine difficilement les pitons de la lune. Je suis obligé de faire un effort pour comprendre l’intention de l’auteur.

Quand vous lisez « piton de la lune » que voyez-vous ?

L’image qui m’est d’abord venue est celle d’un piton rocheux (on parlait de la lune passive et la lune est une planète… bêtement, je vois les cratères… et les éventuels pitons). Mais je ne voyais pas de montagne lunaire visible de la Terre. Cela ne collait pas.

L’auteur voulait sans doute peindre l’arc ou le croissant, aux pointes recourbées. Et il est vrai qu’un piton est aussi un clou ou une vis à tête tordue… Il y a donc un rapport, mais peu évident.

Une image est là, au contraire, pour exciter la sensation et frapper l’imagination, directement.

Dans cette première phrase l’auteur s’est emmêlé les pinceaux. Il voulait peindre une atmosphère nocturne, mais n’a pas su choisir les bons mots pour susciter l’image adéquate.

Copiez les bons auteurs

lune

Contrairement à ce que je peux lire parfois, il ne s’agit pas de lire de tout. Je conseille plutôt de viser les valeurs sûres. Mais je vous en reparlerai.

Voici par exemple comment deux auteurs célèbres peignent une atmosphère nocturne :

« Je regardais (…) la lune se traînant sur la cime dépouillée de la futaie : j’aurais voulu habiter ce monde mort, qui réfléchissait la pâleur du sépulcre. » Chateaubriand

Ou d’un contemporain :

« La lune perça entre les nuages, pailletant l’herbe de reflets argentés. » Crichton

Et vous, comment auriez-vous écrit cette phrase ? Proposez votre version en commentaire !

Un style clair et concis donnera toute la puissance à votre histoire. Traquez dans vos phrases les lourdeurs. Résistez à la tentation de vous cacher derrière les tournures précieuses et alambiquées.

Par peur d’être mis à nu, les auteurs (et moi le premier) ont tendance à complexifier la forme naturelle des phrases. On s’imagine briller en étant plus obscur. Mais c’est une grave erreur. Le génie est limpide au contraire. Il hisse à son niveau le lecteur.

Alors gardez toujours ce cap : faites simple.

C’est facile à dire, hein ! En réalité, c’est beaucoup de travail. Peu importe si vous n’écrivez pas aujourd’hui comme Molière ou comme Boileau. Pour vous en approcher, appliquez-vous à la réécriture.

Le style qui paraît naturel est en fait très travaillé. Chaque mot doit être choisi !

« On m’a reproché que mon style était voulu, c’est-à-dire travaillé. Je ne sais pas ce que c’est qu’un style qui n’est pas travaillé, qui n’est pas voulu, ou plutôt je crois savoir que ce n’est pas un style. » Charles Péguy

Emparez-vous de vos mots !
Au boulot !

Eric

P.S. La semaine prochaine, j’enverrai aux abonnés à la lettre hebdomadaire les 4 points cardinaux pour améliorer son style. Ne le manquez pas ! (si vous n’êtes pas inscrit, cherchez « newsletter » en haut de la page. En plus, vous aurez des cadeaux de bienvenue ! 😉 )