Quand on écrit un roman, il y a un temps de maturation, de construction, où l’histoire se métamorphose. Un peu comme la chenille dans son cocon.

Le cocon peut être un confort si désirable, qu’on ne voudrait jamais quitter. Mais il peut aussi être vécu comme une prison étouffante dont il faudrait s’extirper le plus vite possible.

Ainsi l’auteur est souvent tiraillé entre ces deux tentations contraires :

Tentation n°1 – Il voudrait garder son œuvre dans son cocon : en inventant un monde qui s’étale à l’infini, en fouillant sans fin les personnages, ou encore, en tournant en rond dans la remise en cause de ce qui a été déjà écrit…
Tentation n°2 – Il voudrait sortir tout de suite son histoire du cocon : lire son propre livre, comme s’il venait de l’acheter chez un libraire, le découvrir en même temps qu’il l’écrit…

Pour bien vivre ce moment de maturation dans l’écriture, il est important de bien en comprendre les enjeux. Dans cet article, je vous brosse un tableau des étapes pour écrire une histoire.

Pour être parfait, le papillon doit passer par deux mues successives.
De chenille, il devient nymphe (entourée de cocon chez certaines espèces) ; puis de nymphe, il s’épanouit en imago (avec ses ailes).

imago

Étape 1 : Le Tissage du cocon

Si vous vous êtes déjà lancé dans un projet de roman, vous avez probablement plus ou moins vécu cette phase d’inspiration.

– Vous vous entourez d’imaginaire, vous créez un monde, vous donnez vie à des personnages…
– Vous avez lu un livre ou vu un film que vous auriez aimé écrire…
– Vous avez vécu un tournant dans votre vie et vous voulez prendre du recul en écrivant…
– Vous voulez faire passer un message au monde…
– Vous voulez raconter une histoire captivante…

Votre inspiration est une sorte de mélange unique de tout cela et de beaucoup d’autres choses encore.

Tout au long de la maturation, il est important de nourrir son inspiration. Des techniques existent pour trouver des idées créatives.
(Bon, évidemment, je ne vais pas pouvoir tout développer ici, car le but est de vous brosser un tableau d’ensemble)

Une fois le cocon tissé, la métamorphose peut commencer.

Étape 2 : Le temps de la nymphe

Quand la chenille devient nymphe, elle entre dans une maturation protégée pendant laquelle son corps se restructure complètement et où des nouveaux organes apparaissent : un autre système digestif, des organes reproducteurs, des articulations, des pattes, des ailes…
Cette phase de la nymphe est essentielle chez le papillon – c’est assez évident.

Elle l’est aussi pour l’histoire que vous voulez raconter. Vous vous souvenez de la tentation n°2 ?

→ Si vous ouvrez le cocon trop tôt, votre histoire restera à l’état larvaire ou risque la malformation.

Il ne faut pas forcer les choses. Pour prendre le temps de bien vivre cette maturation, il faut d’abord accepter que votre histoire ne soit pas formée d’un seul coup.
Autrement dit, vous ne pouvez pas écrire votre histoire comme si vous en étiez le lecteur.

Auteur ou lecteur ? Telle est la question…

Le seul moment où vous pouvez être auteur ET lecteur en même temps, c’est en écrivant une histoire à la volée, intuitivement, comme on écrit un journal intime.

Écrire une histoire au fil de la plume est un excellent exercice, un entraînement pour stimuler son imagination et travailler son style.

C’est une friandise pour l’auteur, car il a déjà l’impression de voir son histoire se dérouler, de la découvrir comme un lecteur privilégié. C’est un outil à ne pas négliger, surtout si on a besoin de se motiver.
D’ailleurs, je conseille parfois cette technique à des auteurs bloqués dans la phase d’inspiration (le tissage du cocon). C’est une bonne façon d’écrire pour soi.

Mais ce n’est pas la meilleure façon de mûrir une histoire captivante, destinée aux autres.
En effet, pour déployer des ailes colorées et harmonieuses, votre histoire a besoin de passer par différentes étapes de structuration.

Les étapes de la métamorphose

Lors de cette phase de construction de votre œuvre, vous déterminez la forme générale de votre histoire, en partant de votre désir initial (qui émerge de la phase d’inspiration).

En effet, quand vous avez tissé le cocon, vous avez agité des idées, des émotions, des images… À présent, vous allez en faire un tout structuré. Vous lui donnez de nouvelles articulations, de nouveaux organes, des ailes…

Voici les principales étapes par lesquelles on peut passer (là encore, je ne développe pas ici) :

1 – travail de structuration de l’intrigue (c’est-à-dire l’enchaînement des actions nécessaire à l’histoire, découpé en scènes) en lien avec le thème (c’est-à-dire la morale de l’histoire, quand vous en avez choisie une)
2 – mise en place de l’arrière-histoire, en fonction de l’intrigue (c’est-à-dire tout ce qui ne sera pas directement utile au déroulement de l’intrigue, mais qui peut décorer, donner une ambiance, ouvrir une perspective…)
3 – répartition des rôles « logiques », en fonction de vos personnages (que vous pourrez plus ou moins complexifier)

Si cette liste vous fait peur, rassurez-vous : prenez plutôt ces étapes comme de nouveaux outils que nous découvrirons ensemble au fil du temps. 😉

D’ailleurs vous en connaissez probablement déjà, au moins intuitivement.

Étape 3 : La sortie du cocon

Quand les éléments structurels de votre histoire sont en place, vous pouvez commencer à en déployer les ailes, à les mettre en mouvement.

Cela va vous demander encore un effort, car il faut suivre scrupuleusement tout ce que vous avez posé et en même temps vous en détacher.

À cette étape, vous aurez une vision claire et détaillée de l’intrigue et du réseau des personnages. À présent vous pouvez vous occuper :

1 – de la mise en scène (descriptions des actions, des personnages et des ambiances)
2 – du ficelage des dialogues
3 – de la correction et de l’efficacité du style

En attendant…

Si vous découvrez cette façon d’écrire, continuez comme vous faisiez avant. Mon but n’est pas de révolutionner vos habitudes en si peu de temps !

Je veux juste vous dresser le menu pour la suite et titiller votre curiosité. Comme vous pouvez le voir, il y a du pain sur la planche !

Mais vous êtes motivés, pas vrai ? 😉

Alors au boulot ! 😀

Eric

P.S. Mais au fait : que pensez-vous de ce tour d’horizon ?